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tutoriel serti masse

Le sertissage est une technique qui requiert bien souvent beaucoup de maîtrise et d’expérience. À ce titre, ce n’est donc pas une technique que l’on recommande aux débutants en bijouterie. En effet, il ne faut pas oublier que « sertisseur » est un métier en soi. Toutefois, si vous avez déjà fait vos armes avec les techniques de base, vous aimeriez peut-être pousser votre pratique un peu plus loin, en intégrant des pierres fines ou précieuses à vos créations. Depuis que j’ai lancé ce blog, j’ai remarqué que la plupart des bijoutiers autodidactes sont particulièrement intéressés par le serti masse.

Proche cousin du serti gypsy, on le confond souvent avec ce dernier. Moi-même, j’ai fait l’amalgame, car ayant appris la joaillerie au Québec, les termes que l’on utilise dans ce pays et en France ne sont pas forcément les mêmes. Le résultat final étant très semblable, j’ai donc pris pour acquis que « serti masse » était tout simplement une traduction de « gypsy setting ».

Heureusement, ayant créé un groupe Facebook qui me permet d’échanger notamment avec des bijoutiers et joailliers français, j’ai pu récemment comprendre les nuances qui différencient ces deux techniques de sertissage.

En parcourant le web et en discutant avec d’autres bijoutiers, j’ai constaté que je n’étais d’ailleurs pas la seule à les confondre. Dans la foulée, j’en ai donc profité pour demander au bijoutier qui me les a expliquées de partager ses connaissances en la matière sur le blog, ce qu’il a généreusement accepté de faire ;)

Je vais donc laisser la parole à Roberto Bozzacchi dans cette série d’articles sur le serti masse et le serti gypsy.

Qu’est-ce qu’un serti masse ?

Son nom est à l’image de la grande quantité de métal qui entoure la pierre. De ce fait, l’observateur a l’impression que la pierre est incrustée dans une masse de métal. Bien que la bordure qui entoure la pierre peut-être réduite en s’approchant parfois du serti clos, techniquement ce type de serti ne sera jamais aussi mince que ce dernier.

Il existe deux variantes basées sur cette même technique. L’une plus simple et peut-être plus ancienne, bien qu’il s’agisse du même principe, possède une autre dénomination : le serti gypsy (ou flush). Mais nous reparlerons du serti gypsy dans l’article de la semaine prochaine.

Les outils pour le serti masse

Pour maintenir la pièce à sertir :

  • Bâton de sertisseur + ciment de sertisseur ;
  • ou étau à main en bois ;
  • ou étau ou boulet de sertisseur.

Pour sertir :

  • Masse de sertisseur ( pleine ) ;
  • ou marteleur mécanique ;
  • brunissoirs.
masses de sertisseur
Masses de sertisseur | Photo : Roberto Bozzacchi

Pour la finition :

  • Échoppe plate ou droite ( 1 mm, 1.5 mm ou +) ;
  • Limes triangle ou dos d’âne, douces et très douces, N° 4, 6 et 8.

Réalisation d’un serti masse

La préparation

Le serti masse peut s’appliquer à toutes les formes de pierres, même dissymétriques, et à n’importe quel endroit sur la surface d’une pièce (centré ou excentré). Cependant, il faut veiller à avoir une hauteur de métal suffisante, qui puisse à la fois assurer la protection de la pointe de la culasse de la pierre, en dessous, et qui laisse également assez de métal à rabattre par-dessus la ligne du feuilletis. Il faudra donc dès le départ choisir une épaisseur de métal suffisante pour réaliser le bijou, en prenant en compte la hauteur de la pierre, de la pointe de la culasse à la table.

anatomie-pierre
Anatomie d’une pierre facettée | Objectif Bijoux

Il existe deux conditions essentielles pour réaliser un serti masse. La première est de s’assurer que le logement de la pierre l’empêche aussi bien de descendre, que de bouger dans le plan horizontal. La deuxième est que les parois de ce logement doivent être d’aplomb, à l’équerre de la table. 

Par ailleurs, une fois la pierre dans son logement, la table doit se retrouver à la même hauteur que le point le plus haut du métal à rabattre.

Une fois que l’ajustage de la pierre respecte ces conditions, il ne reste plus qu’à rabattre le métal sur elle.

Fixation de la pièce

Une fois que tous les travaux de préparation de la surface du métal selon la forme et l’emplacement de la pierre, ainsi que l’ajustement sont fait, on peut fixer la pièce à sertir sur un bâton de sertisseur (ou tout autre moyen adapté). Cette étape est importante. En effet, en raison des efforts appliqués, la pièce doit impérativement être solidement fixée.

Le sertissage

Comme dans la plupart des cas, sertir consiste à déplacer une portion de métal par-dessus la ligne de feuilletis pour emprisonner la pierre.

En premier lieu, on fixera la pierre à l’aide de points de pression effectués dans les quatre directions des points cardinaux pour la bloquer définitivement dans son logement. Ensuite, on fera de même dans les emplacements intermédiaires (entre ces quatre points) en complétant le tour.

Avec une masse de sertisseur ou un marteleur, on travaillera exclusivement sur le bord de la sertissure, en exerçant une pression verticale, perpendiculairement à la surface du métal.

serti masse
Croquis de Roberto Bozzacchi

Il faudra faire plusieurs tours pour obtenir une lèvre régulière et généreuse faite par le métal déplacé.

Il n’est pas nécessaire de chercher à écraser complètement cette lèvre contre la couronne de la pierre (nous reviendrons sur ce détail lors de la finition). Notez sur le dessin que c’est le déplacement du métal en profondeur (près du feuilletis) qui sert à bloquer la pierre. Cela est possible uniquement s’il n’y a pas d’espace entre la pierre et le métal. Autrement dit, si cette dernière est bien ajustée.

La finition

Pour commencer, il faudra égaliser la surface abîmée par la pression exercée, avec des limes aiguilles triangle et/ou dos d’âne douces et très douces, pour rattraper les lignes du profil de la surface du métal (plate ou courbe) autour du serti (voir croquis).

L’écart laissé entre le bord de la lèvre et la couronne de la pierre trouve son intérêt dans la découpe du bord de la lèvre avec l’échoppe. En effet, cet écart facilite ainsi le positionnement de l’échoppe qui n’a alors pas besoin d’être en contact avec la pierre. On découpe donc ce bord à l’échoppe plate, affûtée et bien polie, pour obtenir un filet (une mince bande circulaire nette et très brillante) comme frontière de séparation entre le métal et la pierre. On peut ensuite polir ce filet à l’aide d’un brunissoir.

échoppes plates
Échoppes plates | Photo : Roberto Bozzacchi

En dernier lieu, on peut procéder à un léger polissage et avivage de la zone que l’on vient de limer (le polissage complet du bijou doit avoir été réalisé avant le sertissage).

Récapitulatif des étapes

  1. Choisir la bonne épaisseur de métal, afin de pouvoir accueillir la pierre sans que la pointe de la culasse ne dépasse.
  2. Réaliser l’ajustage de la pierre aux fraises et/ou échoppes, en descendant jusqu’à aligner la table avec la surface du métal. Son logement ne doit pas comporter plus de jeu latéral que celui pour la laisser rentrer et sortir sans difficulté. S’assurer également que les parois qui iront se rabattre sur elle soient à l’équerre de la table.
  3. Fixer la pièce à sertir sur un bâton de sertisseur avec du ciment à sertissage, un étau à main ou un boulet de sertisseur.
  4. Fixer la pierre à l’aide de points de pression effectués dans les quatre directions des points cardinaux pour la bloquer définitivement dans son logement. Pour cela, il faut exercer une pression verticale, perpendiculaire à la surface du métal, sur le bord de la sertissure, avec une masse ou un marteleur.
  5. Procéder de la même manière dans les emplacements intermédiaires (entre ces quatre points) en complétant le tour.
  6. Faire plusieurs tours pour obtenir une lèvre régulière et généreuse faite par le métal déplacé, sans chercher à écraser totalement le métal contre la couronne de la pierre.
  7. Égaliser la surface abîmée par la pression exercée, avec des limes aiguilles triangle et/ou dos d’âne douces et très douces, pour rattraper les lignes du profil de la surface du métal autour du serti.
  8. Découper le bord de la lèvre à l’échoppe plate, affûtée et bien polie, pour obtenir un filet (une mince bande circulaire nette et très brillante) comme frontière de séparation entre le métal et la pierre.
  9. Polir ce filet à l’aide d’un brunissoir (facultatif).
  10. Procéder à un polissage de la zone qui a été précédemment limée.
brunissoirs serti masse
Brunissoirs | Photo : Roberto Bozzacchi

Les précautions à prendre

  • S’assurer d’avoir une épaisseur de métal suffisante à la préparation ;
  • avoir fait un très bon ajustement de la pierre ;
  • fixer solidement le travail ;
  • prendre de bons appuis pour exercer les efforts nécessaires et veiller à la direction des forces appliquées ;
  • veiller fortement à contrôler les gestes durant toutes les étapes ;
  • veiller à obtenir une bonne régularité dans le déplacement du métal et la découpe du filet de finition ;
  • éviter les outils dangereux pour les pierres lors de la finition*.

*En sertissage, les cabrons en papier émeri, meulettes, disques abrasifs, etc., sont à proscrire à proximité des pierres (à l’exception du diamant). En effet, à moins que vous n’ayez déjà une bonne expérience, les risques d’abîmer la pierre avec ce genre d’outillages sont très grands. 

Vous savez maintenant tous ce qu’il y a à savoir sur le serti masse. C’est donc à vous de jouer ;)

La semaine prochaine, nous retrouverons Roberto qui nous expliquera comment réaliser un serti gypsy.

Cet article comporte 11 commentaires

  1. Melaine. dit :

    Un grand merci a vous deux pour cet article fort interessant. Je pensais que je ne serais jamais à meme d’essayer cette technique que je jygeais trop difficile. Maintenant elle me semble beaucoup plus accessible.
    Cependant, je m’interroge sur la preparation de l’espace dans lequel placer la pierre. J’imagine qu’il faut percer avec une fraise, mais comme creer ce surplus de matiere sur le bord du trou?
    Belle journee a vous deux.
    Mélaine.

    1. Caroline R. dit :

      Coucou Melaine, contente de savoir que cet article te motive à te lancer dans cette technique !

      Si ta pierre est ronde, tu peux facilement faire l’assise avec une fraise de sertisseur, pour les autres formes de pierres, ce sera avec des fraises et des échoppes. Quand à ta seconde question, normalement c’est en limant, mais laisse-moi confirmer la réponse avec Roberto puisque c’est lui l’expert 😉

  2. Bozzacchi Roberto dit :

    Bonjour Melaine

    Caroline m’a fait part de ton inquiétude, à laquelle je me permet de répondre.
    Ce surplus de matière, qui n’est pas un est fait à la lime en enlevant la matière de la surface autour de la pierre, créant une couronne ou une sorte de « volcan », cette nouvelle surface parallèle à l’initiale est celle qui détermine la hauteur finale de la pièce, elle doit être estimé en fonction de la dimension de la pierre. Approximativement 1/3 de la hauteur de la couronne de celle-ci.

  3. Merci beaucoup, Roberto!
    Ton article est vraiment très bien construit et très cartésien, ce qu’il me faut, en fait!
    Ca me permet aussi de mieux comprendre d’autres explications que j’ai vues sur ce sujet ou d’autres types de serti.

  4. Bozzacchi Roberto dit :

    Merci pour ton commentaire Mélaine, le sertissage est un métier où tout ce qui gravite autour implique de la rigueur, on à donc essayé avec Caroline de démocratiser mes commentaires pour toucher un plus large panel de lecteurs.
    Heureux que ça puisse t’aider à voir plus loin.

  5. Bonsoir,
    Merci pour toutes ces infos ! J’ai pu réaliser des sertis masse lors d’un stage à l’aide d’une marteleuse. Cependant, j’aimerais m’essayer à la masse à sertir. Où as-tu acheté la tienne (ou l’as tu fabriqué ?). Impossible d’en trouver une !
    Merci et bon we !

    1. Caroline R. dit :

      Bonsoir Elisa, désolée du délais de ma réponse… Personnellement, j’ai acheté la mienne à l’école dans laquelle j’ai étudié… Mais j’ai l’impression que la plupart des joailliers les fabriquent eux-mêmes 😉

    2. Bozzacchi dit :

      Bonjour Élise
      Je m’excuse de n’avoir pas vu ta question, je te réponds très tardivement en espérant que ça arrive bien à toi.
      Ces outils sont fabriqués par moi, je les adapte à besoin aux nécessités du travail ainsi qu’à ma morphologie.
      Les deux de gauche ce sont des pommeaux poignées de portes anciennes, généralement trop grandes pour la moyenne mais j’ai de grands mains, celle de droite est un « outil universel » ou poignée universelle, un outil de bijouterie avec un mandrin ajustable que s’utilise pour monter des fraises ou des perlioirs, la tige, est une vieille fraise détrempée que j’ai taillé à la demande.
      Le plus important est que l’outil se cale très bien dans la paume de ta main, ce qui te permettra d’exercer la force nécessaire pour déplacer la lèvre de métal et former le rebord.

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